Lettre à Madame Yvette...
Chère Madame Yvette, savez-vous comme vous me manquez ? Nous avions passé ensemble presque une année, marquée par des éclats de gaieté comme par des événements moins joyeux. Ah, mais attendez, il serait de bon ton que je vous présente à mes rares lecteurs :
ant, je l'ai assez mal pris
Personnage d'une pièce de théâtre (week-end en ascenseur, de je ne sais plus qui, et de toute façon remaniée à la sauce de l'animateur de notre troupe au sens de l'humour aiguisé), vous étiez drôle malgré vous, ingénue, maladroite et touchante à votre manière. Vous étiez si déconnectée de la réalité du commun des mortels que je ne pouvais que vous aimer. Comment pourrais-je ne pas me sentir proche d'une dame en costume rouge fraise tagada qui propose à ses compagnons de respirer chacun leur tour, pour économiser l'air ? C'est tout moi, ça !
Pourtant, je ne l'ai pasi bien pris quand notre prof de théâtre m'a décrétée faite pour vous incarner. Je m'étais un chouilla vexée à entendre que je vous ressemblais tant. Si vos répliques me faisaient rire, j'espérais ne pas sortir moi-même tant d'énormités à la minute. Et puis... Et puis le prof, aidé de mes compagnons acteurs du dimanche, a empiré votre personnage, l'affublant de plus encore de naïveté confinant à la poésie. Je me refuse à écrire les mots "ridicule" ou "bêtise" car sincèrement, vous n'aviez ni l'un ni l'autre. Juste une forme d'esprit assez originale, qui ne s'accomodait pas de ce vague concept qu'est la logique.
Vous deveniez une sorte de proie facile pour les railleurs, ce qui vous donnait une fragilité émouvante pour moi et risible pour les autres. Consciente de ce fossé grandissant au même rythme que les gags que l'on écrivait pour vous, j'étais réticente à me glisser dans votre peau. Mais va, par amour de l'art, pour pouvoir prouver que sans vous, chère Madame Yvette, le monde serait bien plus triste, je suis entrée sur scène et j'ai assumé les rires de, oh, quelque vingt personnes présentes dans la salle. Et devinez quoi ? J'ai adoré ça, malgré le pincement au coeur.
Et oui, vous me manquez bel et bien... Parce qu'au fond, vous êtes exactement ce pourquoi je crois encore en l'homme : la fantaisie.